En 1932, Pablo Picasso a déclaré, « L’œuvre qu’on fait est une façon de tenir son journal ».

Déployons donc la vie de Picasso, au cours de cette année 1932, comme on déploierait un journal, avec ses grands événements et ses faits divers.

À la une, presque quotidiennement, des tableaux, prodigieux, qui réinventent la peinture. Nous avons également la première rétrospective de Picasso inaugurée le 16 juin à Paris, la publication du premier volume du catalogue raisonné de son œuvre. Il y a, aussi, les allers et retours entre Paris où Picasso travaille, rencontre ses camarades, visite des expositions, assiste à des concerts, va au cinéma, et le château de Boisgeloup où il travaille tout autant, reçoit des amis, les échappées vers la Côte normande et le voyage à Zurich. Il y a les sollicitations dont il est l’objet, les propositions d’expositions, les échanges avec les marchands et les collectionneurs.

Picasso vient d’avoir 50 ans, il a une épouse, un fils, une maîtresse, il est le peintre le plus célèbre de son temps et, jour après jour, il construit son œuvre et sa légende.

Le 16 juin 1932 s’ouvre, à la galerie Georges Petit, la première rétrospective de Pablo Picasso.

C’est l’événement mondain de l’année. Plus de 2 000 visiteurs en tenue de soirée, un buffet qui a coûté la somme considérable de 40 000 francs… Et surtout, 223 tableaux, dont une trentaine a été exécutée pour l’occasion, sept sculptures, des livres illustrés, qui suscitent des centaines de réactions. L’exposition s’accompagne d’un catalogue, d’un numéro spécial de la revue « Cahiers d’art »  et du catalogue raisonné de Picasso.

Elle est largement commentée dans la presse internationale

Picasso, qui n’avait jamais accepté un événement d’une telle ampleur, s’est impliqué à chaque étape de la préparation, jusqu’à décider lui-même de la disposition de ses œuvres.

Pourtant, il dédaigne l’inauguration, préférant aller au cinéma.

La Kunsthaus de Zurich s’est entendue avec Pablo Picasso pour reprendre, dans une version légèrement modifiée, la rétrospective de l’exposition Georges Petit.

C’est l’occasion pour Picasso d’effectuer, entre le 7 et le 13 septembre, un voyage en Suisse en compagnie d’Olga et Paul. De ce voyage bien documenté, nous pouvons suivre chaque étape. La famille s’arrête à Strasbourg, passe par Bâle avant de rejoindre Zurich. Accompagné par un peintre, Hans Welti, et une historienne de l’art, Doris Wild, ils visitent la ville, et rencontrent l’équipe de la Kunsthaus ainsi que des collectionneurs et des marchands. Les photographies montrent une famille heureuse et complice.

Pourtant, le jour de l’inauguration, Picasso agit comme pour l’exposition parisienne: Olga, Paul et lui partent vers Saint-Moritz et Interlaken.