Chefs d'oeuvre

Après de multiples études et en deux versions légèrement différentes, à la sanguine et à l'huile, l'œuvre « Trois Femmes à la fontaine » reprend le motif traditionnel des Trois Grâces en un ensemble de trois figures aux formes sculpturales unies par les arabesques de leurs mouvements.

Cette peinture s'est nourrie à diverses sources : la sculpture antique, les œuvres du peintre classique Nicolas Poussin (« Éliezer et Rébecca », 1648, musée du Louvre, Paris), celles d'Ingres (« La Source », 1856, musée d'Orsay, Paris) ou encore celles, si singulières dans leur réinterprétation symboliste du classicisme, de Puvis de Chavannes (« Jeunes Filles au bord de la mer », 1879, musée d'Orsay, Paris).

Cette peinture est exécutée au cours de l'été que Picasso passe à Fontainebleau, où le château conserve des œuvres du peintre maniériste Le Primatice qui l'inspire par les subtiles déformations qu'il fait subir au corps humain et dans l'usage d'un cadrage resserré. Cependant, la monumentalité de cette composition tient surtout au traitement plastique des figures dans l'espace. La toile est totalement emplie par la plénitude des formes féminines, dont les attitudes s'équilibrent en une ordonnance rigoureuse. Le drapé rigide des tuniques à l'antique, de même que le traitement des corps paraissent avoir une densité semblable à la pierre sur laquelle s'appuient ces femmes.