Chefs d'oeuvre

Dans un espace restreint, sur fond d'horizon maritime, cette composition décrit plusieurs scènes: au premier plan, une fillette tenant une bougie et un bouquet de fleurs fait face à un Minotaure souffrant; entre eux, une femme torero mortellement blessée sur son cheval, à la renverse. À gauche, un homme barbu, d'apparence christique, s'échappe par une échelle, mais se retourne pour regarder la scène. A l'arrière-plan, deux jeunes femmes avec colombes observent tranquillement la scène depuis une fenêtre. Le Minotaure, mi-homme mi-dieu, né des amours de Pasiphaé et d'un taureau, apparaît dès la «Suite Vollard» (série de cent estampes gravées entre 1930 et 1937 et éditées en 1939)comme un double de l'artiste. Il est aussi une figure emblématique du surréalisme, notamment de la revue éponyme éditée de 1933 à 1939 sous l'impulsion conjointe des éditeurs Albert Skira et Tériade.

Exécuté au printemps 1935, ce chef-d'œuvre de l'estampe picassienne est le résultat d'un intense travail, documenté par de nombreux états. Véritable construction symbolique qui mêle la mythologie grecque à la tradition espagnole de la corrida, La Minotauromachie cristallise les combats intérieurs qui occupent un Picasso alors en pleine crise personnelle. Marquée par la séparation d'avec sa première femme Olga, mais aussi par la maternité annoncée de sa jeune maîtresse Marie-Thérèse Walter, cette crise se traduira par une interruption de son travail de peintre de mai 1935 à février 1936.