

Chefs d'oeuvre
de la collection
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Dora Maar a bien changé. La femme parée de couleurs stridentes et aux ongles laqués (Portrait de Dora Maar, 1937, MP158, voir couverture) est devenue tête de mort. La question du modèle est en réalité accessoire pour ces deux huiles sur papier à dessin réalisées à Royan les 10 et 11 juin 1940. Picasso a installé un atelier à la villa les Voiliers depuis janvier, où il se rend périodiquement en pleine «drôle de guerre». La citoyenneté française lui a été refusée en mars, la Sûreté ayant retrouvé un dossier des années 1900 le décrivant comme un «anarchiste». L'offensive allemande débute le 10 mai. Le 10 juin, le gouvernement français quitte Paris pour Bordeaux et la capitale est déclarée ville ouverte le 11. Charles de Gaulle lance son Appel le 18, la capitulation est signée le 22.
Ces têtes sont peintes au cœur d'une des périodes les plus troubles de l'histoire de France, alors que Picasso, réfugié à Royan depuis le 16 mai, parti comme d'autres en exode, ne sait pas s'il va pouvoir rentrer à Paris et retrouver son atelier et ses œuvres. L'invasion allemande s'étend, comme le nombre de victimes. Ces têtes, avec leurs couleurs délavées, font écho au tragique contemporain.