Jeudi 24 mars : Picasso et la sculpture. Sources et influences

Ouverture du colloque

Laurent Le Bon, président du Musée national Picasso-Paris

Serge Lasvignes, président du Centre Pompidou

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Aux sources de la sculpture

Werner Spies : Conversation avec Cécile Godefroy et Virginie Perdrisot

Werner Spies, historien de l'art et directeur honoraire du Musée national d'art moderne - Centre Pompidou, Paris

Virginie Perdrisot, conservatrice chargée des sculptures, des peintures (1922- 1937), des céramiques et de la collection personnelle de Picasso et commissaire de l'exposition « Picasso. Sculptures », Musée national Picasso-Paris

Cécile Godefroy, docteur en histoire de l'art et commissaire associée de l'exposition « Picasso. Sculptures »

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Catherine Chevillot « Picasso et Rodin » , Conversation avec Cécile Godefroy et Virginie Perdrisot

Catherine Chevillot, conservateur général du Patrimoine et directrice du Musée Rodin, Paris
 

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Les points de contact entre Picasso et Rodin existent, même s’ils ne sont ni très nombreux ni très documentés. Mais l’analyse conjointe des œuvres de ces deux géants de la sculpture ne peut se résumer à cette liste. La présente contribution évoquera quelques pistes d’études à travers les pratiques, les inventions formelles et la relation des artistes à la création.

Biographie : Conservateur du patrimoine depuis 1987, Catherine Chevillot a été successivement adjointe au directeur du musée de Grenoble (1988-1990), conservateur au musée d’Orsay (section Sculptures, 1990-1996), chef de la filière Sculpture au Centre de recherche et de restauration des musées de France (1999-2003), chef du service de la recherche du musée d’Orsay (2003-2008), conservateur en chef au musée d’Orsay pour la Sculpture (2008-2012). Elle dirige le musée Rodin depuis 2012, et a conduit une très importante campagne de rénovation de l’hôtel Biron, qui présente les collections du musée ; le bâtiment a rouvert au public le 12 novembre 2015. Membre du conseil scientifique du Louvre Abu Dhabi. Suppléante au Haut Conseil des musées de France. Chevalier de la Légion d’honneur en 2015. Catherine Chevillot est une spécialiste de la sculpture des xixe et xxe siècles, et a réalisé dans ce domaine des expositions comme « Emmanuel Fremiet, la main et le multiple » (musées de Dijon et de Grenoble, 1988), « Denys Puech » (musée de Rodez, 1992), « François Pompon » (1994, collaboration avec Liliane Colas et Anne Pingeot), « Auguste Préault » (1997, en collaboration), « Oublier Rodin », Paris, 2009). Elle a dirigé le Catalogue des collections du xixe siècle du musée de Grenoble (1995), le répertoire À nos grands hommes (base de données de 5 000 monuments sculptés, INHA, 2004, prochainement en ligne), et prépare le Catalogue des sculptures du musée des Beaux-Arts de Lyon (collaboration avec Claire Barbillon et Stéphane Paccoud). Docteur en histoire de l’art, elle a soutenu en 2013 (université de Paris-Ouest Nanterre La Défense) une thèse intitulée Paris, creuset pour la sculpture (1900-1914). Elle est commissaire de l’exposition « Rodin l’exposition du centenaire » en mars 2017 aux Galeries nationales du Grand Palais (Paris).

Colloque « Picasso. Sculptures » - Catherine Chevillot - « Picasso et Rodin »

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Elena Pardo/Rubén Ventureira : « The trace of A Coruña. From the Drawn Sculpture to the Sculpted Drawing »

Elena Pardo, professeur, Escola de Arte e Superior de Deseño Pablo Picasso, A Coruña

Rubén Ventureira, journaliste et écrivain

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Cet exposé analyse et revendique l’influence sur l’œuvre picassienne de certains modèles que l’artiste a rencontrés lors de son passage à l’École des beaux-arts de La Corogne où il a commencé sa formation artistique entre 1891 et 1895. À cette époque, il maîtrise la technique de dessin académique à partir de modèles en plâtre, copies de sculptures classiques en marbre. Parmi ces premiers modèles académiques se retrouvent quelques-uns des thèmes récurrents de son travail ultérieur.

C’est le cas du faune, un leitmotiv picassien dont la première représentation apparaît à La Corogne, dans un travail académique à partir d’une tête de plâtre, copie de l’original conservé au musée du Vatican. Mais aussi de l’homme au mouton, autre thème de référence dans la sculpture de Picasso dont l’origine est un modèle classique romain, également reproduit au fusain pour la première fois à La Corogne en 1895. Ou bien encore de la figure d’Hypnos, dieu du sommeil, dont la tête ailée peut être vue comme une référence au célèbre « Visage de la paix ». Les formes de la Thésée du Parthénon, autre modèle de sa formation à La Corogne, résonnent également dans les œuvres en carton plié qui réinterprètent « Le Déjeuner sur l’herbe » de Manet.

Ceux-ci et d’autres pièces conservées encore aujourd’hui à l’École des beaux-arts de La Corogne prouvent non seulement l’influence de ces premiers modèles sur le travail futur de Picasso, mais mettent également en évidence la relation étroite entre le dessin et la sculpture pour l’artiste andalou, puisque son apprentissage vient de l’étude de la statuaire classique et que la sculpture picassienne est, au sens large, un dessin dans l’espace tridimensionnel.

L’influence de La Corogne ne se manifeste pas uniquement à travers des œuvres académiques : Picasso assiste à des corridas dans cette ville, documentées dans plusieurs dessins et notes. Une des affiches annonçant la Féria d’août 1894, en forme de guitare estampée, peut avoir inspiré les guitares picassiennes de 1913. Enfin, nous démontrons comment le premier contact de Picasso avec la sculpture africaine se produit à La Corogne, où se trouvait le musée Romero Ortiz. L’œuvre la plus importante de sa collection était « Matiabo », une idole d’une tribu d’origine africaine rapportée lors d’une guerre à Cuba. Cette sculpture, aujourd’hui conservée à Tolède, présente une forte ressemblance avec quelques-unes des pièces de la collection de Picasso d’art africain et océanien dont le primitivisme a tellement influencé sa création.

Biographies : Elena Pardo Antequera (Lugo, 9 novembre 1976) a un diplôme en beaux-arts et un autre en publicité de l’université de Vigo. Elle a travaillé dans les secteurs de la communication, du dessin et de la publicité avant de devenir enseignante en arts plastiques et dessin, en 2007. Actuellement, elle enseigne à l’École d’art et supérieure de dessin Pablo Picasso, à La Corogne. Étant membre du comité scientifique de l’exposition « El primer Picasso. A Coruña 2015 » (Le premier Picasso. La Corogne 2015) (2015), elle a écrit deux articles dans son catalogue.

Rubén Ventureira Novo (La Corogne, 4 mai 1971) est journaliste, diplômé de l’université complutense de Madrid, et consultant culturel. Il a travaillé pour les journaux El Ideal Gallego (décembre 1997-juillet 1998) et La Voz de Galicia (août 1998-janvier 2012). En outre, il a été le coordinateur général de l’événement « A Coruña. 120 años después » (La Corogne. 120 ans plus tard) (2015), comprenant huit expositions. Il a été aussi membre du comité scientifique de l’exposition la plus visitée, « El primer Picasso » (Le premier Picasso), et coordinateur de son catalogue dont il a rédigé deux articles.

Colloque « Picasso. Sculptures » - Elena Pardo/Rubén Ventureira : « The trace of A Coruña. From the Drawn Sculpture to the Sculpted Drawing »

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Olivier Berggruen : « Réelle présences: des éléments décoratifs des ballets "Parade" et "Mercure" considérés en tant que sculptures »

Olivier Berggruen, historien de l'art

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Colloque « Picasso. Sculptures » - Olivier Berggruen « Réelles présences : des éléments décoratifs des ballets Parade et Mercure considérés en tant que sculptures »

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Table ronde « Le Monument à Apollinaire »

Modération par Peter Read, professeur, University of Kent
« Ink and Iron : revisiting Picasso’s metal monuments to Apollinaire »

Joseph Henry, doctorant en histoire de l'art, CUNY Graduate Center, New York
« The Form of the Void »

Carmen Giménez, curator, Solomon R. Guggenheim Museum, New York
« Drawing in Space »

Michael FitzGerald, professeur des beaux-arts, Trinity College, Hartford
« The Monument to Apollinaire and Picasso Scholarship: Some Thoughts on the Last 40 Years »

John Finlay, docteur en histoire de l'art
« Picasso, Theatre and the Monument to Apollinaire »

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Peter Read, professeur, University of Kent
« Ink and Iron : revisiting Picasso’s metal monuments to Apollinaire »

Cette intervention se propose de revisiter les sculptures métalliques les plus significatives réalisées par Picasso en collaboration avec Julio González entre 1928 et 1932. Certains de ses carnets, ainsi qu’une série de dessins qu’il a réalisée dès 1912, témoignent chez Picasso de la mise en œuvre d’une stratégie créatrice fondée sur une volonté soutenue de recherche et d’expérimentation. L’artiste a en effet consacré vingt-cinq ans au développement d’idées concernant l’emploi dans la sculpture d’espaces vides, de plaques métalliques et de fils de fer. L’intervention revient également sur le rôle joué par la prose de fiction d’Apollinaire, ainsi que par ses chroniques d’art et ses écrits sur les musées ethnographiques, en tant qu’inspirateurs de sculptures en métal de Picasso, destinées à la tombe du poète. Proposant un document inédit qui évoque des rencontres possibles entre Apollinaire et González avant la Grande Guerre, l’intervention offre également des éléments d’appréciation de plusieurs sculptures et des observations concernant l’état actuel de la version en bronze de « La Femme au jardin ». La juxtaposition des deux versions de cette sculpture, en fer et en bronze, lors de l’exposition « Picasso. Sculptures » en 2016 au musée Picasso, Paris, suscite une comparaison entre les deux œuvres et quelques remarques concernant leurs différences et leurs similitudes. En conclusion, nous soulevons des interrogations concernant la série d’agrandissements tardifs réalisés à partir des maquettes en fil de fer créées par Picasso et González en 1928.

Biographie : Parmi les publications de Peter Read figurent « Picasso and Apollinaire: The Persistence of Memory » (University of California Press, 2008) ; « Guillaume Apollinaire, Correspondance avec les artistes 1903-1918 », coéditée avec Laurence Campa (Gallimard, 2009) ; « Picasso et Robert Desnos, 1923-1945 : “une exigence de liberté” », dans « Cahier de l’Herne Pablo Picasso » (2014) ; « Guillaume Apollinaire/Paul Guillaume, Correspondance » (Gallimard, 2016) ; « Apollinaire : lettres calligrammes manuscrits » (Éditions de la BnF/Textuel, 2016). Membre du conseil scientifique de l’exposition « Apollinaire : le regard du poète » (Paris, musée de l’Orangerie, 2016), il a participé à des catalogues d’expositions à Amsterdam, Barcelone, Londres, Metz, Paris, Toulouse et Washington. Peter Read est professeur d’art et de littérature français à l’université du Kent, Canterbury, Royaume-Uni.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Peter Read - « Ink and Iron : revisiting Picasso’s metal monuments to Apollinaire »

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John Finlay, docteur en histoire de l'art
« Picasso, Theatre and the Monument to Apollinaire »

Cette recherche se concentre sur les connexions symboliques et formelles entre le travail théâtral de Picasso et ses projets de sculpture pour le monument à Apollinaire. En prenant en compte les concepts consacrés de « sculpture vivante », de costumes-sculptures « surréalistes » des ballets « Parade » (1917), « Mercure » (1924), et le projet de monument, les influences majeures résidaient dans le travail littéraire et poétique d’Apollinaire. Le monument de Picasso est aussi très fortement lié aux innovations techniques réalisées par l’artiste au temps son implication dans les arts scéniques. En conséquence, cette étude met en avant l’idée relativement peu explorée que le théâtre a exercé une forte influence sur les projets de monuments de Picasso, et ensuite sur son idée de sculptures vivantes ou mouvantes.

Colloque « Picasso. Sculptures » : John Finlay - « Picasso, Theatre and the Monument to Apollinaire »

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Michael FitzGerald, professeur des beaux-arts, Trinity College, Hartford
« The Monument to Apollinaire and Picasso Scholarship: Some Thoughts on the Last 40 Years »

Les propositions pour le monument à Guillaume Apollinaire, que Picasso a faites en 1927-1930, présentent deux questions fondamentales pour la compréhension de l’art de Picasso : la limitation des définitions basées sur les supports de son travail, et le rôle de la collaboration dans son processus de création, en particulier concernant ses œuvres tardives, la sculpture à grande échelle. La question des supports ne se limite pas à la relation de la sculpture à la peinture, au dessin et à la gravure, mais comprend également la relation entre les arts visuels et la littérature.

La commande pour un monument destiné à être placé sur la tombe d’Apollinaire au cimetière du Père-Lachaise, que Picasso a reçue en 1920 d’un groupe d’amis du poète, présentait pour Picasso un défi inhabituel de collaboration, tant pour sa réalisation que pour définir l’héritage d’Apollinaire. Alors que le partenariat de Picasso avec Julio Gonzàlez est à l’origine de certaines de ses meilleures sculptures, en particulier les Constructions de fil (1928) et La Femme au jardin (1929), ce projet a échoué en raison des divergences de vues entre Picasso et les membres du comité, en particulier le désir de l’artiste d’associer Apollinaire (et lui-même) au mouvement du surréalisme.

Au début des années 1930, cet échec a entraîné une nouvelle proposition majeure de Picasso, les Constructions de fil, dépouillée de l’inspiration initiale du Poète assassiné d’Apollinaire et redéfinie en des termes abstraits strictement formels comme « dessins dans l’espace ». Pendant près de quarante ans, ces sculptures n’ont pas été commentées en relation avec leur objet, qu’il s’agisse de leur inspiration littéraire ou de leur connexion à des peintures et des dessins contemporains de Picasso. Au début des années 1970, plusieurs relectures des propositions pour le monument à Apollinaire ont permis de reconsidérer l’ensemble de leurs significations d’interprétation et les défis de cette collaboration, questions désormais reconnues comme élément central de l’étude de la sculpture de Picasso.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Michael FitzGerald - « The Monument to Apollinaire and Picasso Scholarship. Some Thoughts on the Last 40 Years »

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Carmen Giménez, curator, Solomon R. Guggenheim Museum, New York
« Drawing in Space »

Biographie : Depuis 1989 Carmen Giménez est commissaire d’expositions du musée Solomon R. Guggenheim, à New York. Citons parmi ses expositions : « Picasso et l’âge de fer » (1993), « La Peinture espagnole du Greco à Picasso » (2006-2007), et « Picasso noir et blanc » (NY et MFA, Houston, 2012-2013). Elle a entrepris le travail préparatoire fondamental du futur musée Guggenheim de Bilbao en 1990. Directrice du Centre national des expositions du ministère de la Culture d’Espagne de 1983 à 1989, elle a participé au choix de l’ancien hôpital San Carlos, bâtiment du xviiie siècle, destiné à accueillir le Centro de Arte Reina Sofia dont elle a été en 1986 commissaire de l’exposition inaugurale. En 1988, le Centro devient musée national et elle se voit confier la charge des expositions jusqu’en 1989. En 1992, elle est directrice du projet « Picasso clásico » (Palacio Episcopal, Málaga) puis, en 1994, commissaire de l’exposition « Picasso premier regard, la collection Christine Ruiz-Picasso » (Málaga, Palacio Episcopal ; Séville, Pabellón Mudéjar ; Nîmes, Carré d´Art). Chargée en 1997 de la création du musée Picasso, à Málaga, et de sa collection, elle en a supervisé les travaux de rénovation et, en tant que première directrice, a organisé l’exposition d’ouverture, « El Picasso de los Picasso » (2003). Distinctions reçues : la médaille d’or des Beaux-Arts, 2004, décernée par le Roi et la Reine d’Espagne, membre du Conseil d’administration du musée du Prado et de la Fondation Joan et Pilar Miró, Mallorca, académicienne d’honneur de l’Académie royale des beaux-arts de San Fernando, Madrid. « Picasso The Line », à The Menil Collection, Houston, inaugurée le 14 septembre, 2016.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Carmen Giménez - « Drawing in Space »

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Joseph Henry, doctorant en histoire de l'art, CUNY Graduate Center, New York
« The Form of the Void »

Malgré des changements de styles, de matériaux et de technique, l’œuvre sculpturale de Picasso est marquée par une présence constante : ses desseins pour le monument à Guillaume Apollinaire. Dès l’annonce du projet dans les pages de « L’Action » et jusqu’à sa réalisation au MoMA à New York en 1973, Picasso revient au monument et à ses différentes itérations de manière répétitive. Étant donné cet intérêt intense, mon article prend le monument au pied de la lettre – en tant qu’œuvre d’art conçue pour commémorer la mort de l’ami proche et du défenseur de Picasso. En particulier, je me concentre sur le seul projet pour le monument réalisé de son vivant – celui que Spies et Piot identifient dans leur catalogue raisonné par la référence SP 68. Je repère les opérations formelles de la perte telles qu’elles se manifestent dans le monument, en insistant de manière critique sur l’agrandissement à taille humaine de l’œuvre au début des années 1960, et sur sa version finale au MoMA, mesurant approximativement 13 pieds (396,24 cm) de hauteur. Je soutiens que c’est en effet cette dernière œuvre qui réalise le plus efficacement la fonction commémorative de la perte d’un objet – ici, d’une vie. Mon interprétation analyse les aspects formels du projet plutôt que de solliciter une iconographie précise. Des spécialistes tels que Rosalind Krauss, Alan Bowness et Peter Read ont proposé plusieurs identifications du contenu de SP 68, allant de la parodie de l’Aurige de Delphes au navire empli de masse et de gréements. Alors qu’une tête anthropomorphique et qu’une paire de mains apparaissent visiblement dans l’œuvre, je maintiens que le monument déjoue et diffère toute reconnaissance figurale. À la fois sculpture en ronde bosse et matrice de lignes entrecroisées, la gamme de formes géométriques de l’œuvre menace de s’écrouler en plan purement pictural. Faisant appel à des sources telles que le texte d’Apollinaire « Le Poète assassiné » de 1916, l’essai de Julio González « Picasso et les cathédrales, Picasso sculpteur » de 1931, et des articles de Christian Zervos publiés dans Cahiers d’art au début des années 1930 dédiés au monument, j’affirme que le projet Apollinaire enregistre, paradoxalement, l’espace négatif comme terme positif. Il transforme l’absence en présence. L’engagement du spectateur avec la sculpture de Picasso se manifeste comme effort perpétuel de localisation d’un objet en face de sa propre disparition, un effort ressemblant au processus de commémoration et de deuil lui-même. À travers cette proposition, mon article invite les spécialistes à considérer le monument à travers toutes ses itérations, plutôt que de surdéterminer la valeur de la maquette de 1928. Les photographies de la construction en fil métallique, exécutées en 1933 par Brassaï et publiées dans « Minotaure », ont dominé la conception historique du monument. Si nous accordons une valeur équivalente aux expansions ultérieures de 1968, nous trouverons en effet que le monument conçoit ses relations d’objets non seulement en termes de peinture ou de sculpture, mais aussi, surtout, en termes d’architecture.

Biographie de l'auteur : Joseph Henry est étudiant doctorant en histoire de l’art au Graduate Center, Université de la Ville de New York (CUNY). Ses recherches portent sur l’art moderne et contemporain euro-américain, avec un intérêt particulier pour la performance et l’art en Allemagne. Il a travaillé pour plusieurs institutions, en particulier le Whitney Museum of American Art, le Solomon R. Guggenheim Museum et Artists Space, et écrit pour de nombreuses publications, dont « Art in America », « The Los Angeles Review of Books », « The New Inquiry » et « C Magazine ». Ses projets en cours incluent un article à paraître écrit avec Fabien Maltais-Bayda sur le format d’exposition de la « rétrospective de danse » et un colloque sur la circulation globale d’art contemporain indigène, co-organisé avec Ian Wallace et Christopher Green et prévu en octobre 2016 au CUNY Graduate Center. Joseph enseigne l’histoire de l’art à Brooklyn College.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Joseph Henry « The form of the Void »

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Sculptures et influences

Table ronde « Primitivisme »

Modération par Emilia Philippot, conservatrice chargée des peintures 1895‑1921 et des arts graphiques, Musée national Picasso-Paris

Maureen Murphy, historienne de l'art, maître de conférences en art contemporain, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne «"L'oiseau du Bénin" et les arts d'Afrique »

Audrey Norcia, docteur en histoire de l'art contemporain, Université Paris 1 PanthéonSorbonne, HiCSA-CPC
«"On n'a jamais rien fait d'aussi dépouillé." - Les idoles archaïques de Picasso, Picasso idole d'aujourd'hui »

Joshua I. Cohen, professeur, City College, The City University of New York
« "Picasso's Guitar" (1912) and Two Ivoirian Masks »

Camille Talpin, doctorante contractuelle en histoire de l'art, Université de BourgogneFranche-Comté
« Sculpter par le regard: quand la vue métamorphose des objets et crée l'œuvre »

Erika Martelli, maître de conférence, Università degli Studi di Parma
« En acte et en puissance: le geste créateur entre Michel Leiris et Pablo Picasso »

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Maureen Murphy, historienne de l'art, maître de conférences en art contemporain, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne «"L'oiseau du Bénin" et les arts d'Afrique »

Si l’histoire du primitivisme a été maintes fois évoquée, elle n’a pas encore réellement pris en compte l’importance des arts du royaume du Danhomè dans la création des avant-gardes. Ainsi, bien que central dans l’histoire de l’art moderne et du primitivisme, « L’oiseau du Bénin » dans les collections d’Apollinaire, qui lui inspira très probablement le nom qu’il attribua à Picasso en 1916, n’avait encore jamais véritablement été étudié. Ce texte revient sur l’histoire de cet oiseau en métal, et propose plusieurs pistes d’interprétation quant à son association avec Picasso. Il distingue également plusieurs moments dans le primitivisme de l’artiste, en soulignant l’apport des œuvres du Danhomè aux sculptures qu’il réalise dans les années 1950.

Biographie :

Maureen Murphy est historienne de l’art, maître de conférences à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Elle est notamment l’auteur de De l’imaginaire au musée. Les arts à Paris et à New York (1931-2006), Dijon, Les Presses du réel, 2009. Elle a participé aux expositions « Charles Ratton. L’invention des arts “primitifs” » (musée du quai Branly-Jacques Chirac, 2013) ou « Apollinaire, le regard du poète » (musée de l’Orangerie, 2016). Ses recherches actuelles portent sur l’histoire du primitivisme, les modernismes cosmopolites, l’art contemporain africain, et la politique des expositions.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Maureen Murphy - «"L'oiseau du Bénin" et les arts d'Afrique »

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Audrey Norcia, docteur en histoire de l'art contemporain, Université Paris 1 PanthéonSorbonne, HiCSA-CPC
«"On n'a jamais rien fait d'aussi dépouillé." - Les idoles archaïques de Picasso, Picasso idole d'aujourd'hui »

Interroger le primitivisme cycladique de Picasso se justifie au moins par les nombreuses références à l’idole-violon dans l’essai dialogué de Malraux, « La Tête d’obsidienne », publié un an après la mort de l’artiste : l’écrivain nous y apprend que le peintre-sculpteur en possédait un exemplaire et qu’à maintes reprises il s’était exprimé sur cette plastique dépouillée. Comment cet art protohistorique, daté de –2600/–2100 avant notre ère, a essaimé dans son œuvre ? À quel moment cet emprunt à la sculpture des Cyclades apparaît-il pour s’estomper et finalement resurgir ? Et, d’ailleurs, qu’est devenue cette idole-violon ? Telles sont questions qui orienteront notre propos.

Biographie : Docteure en histoire de l’art, Audrey Norcia a soutenu en 2013 à Paris-I, sous la direction de Philippe Dagen, une thèse qui interrogeait les relations entre l’art contemporain et l’archéologie depuis les années 1950. Cette recherche, à paraître fin 2016 aux Presses du réel, se poursuit au travers de son approche interdisciplinaire qui l’amène à investiguer d’autres champs d’étude esthétique (en particulier le cinéma et la littérature) mais aussi d’autres sciences humaines (archéologie, anthropologie, psychologie). En ce sens, l’auteure coordonne deux ouvrages à paraître (avec Michaël Jasmin, « Des temps qui se regardent : dialogue entre l’art contemporain et l’archéologie », Actes Sud-Errance ; avec Cécile Barbier, « La Trace. Regards croisés d’ergonomes, archéologues et historiens d’art », L’Harmattan). Audrey Norcia est actuellement membre associé de l’équipe HiCSA-CPC (Paris-I) et du groupe de recherche « Pour une histoire universelle des ruines » piloté par Alain Schnapp. Elle a été conseillère scientifique de la partie contemporaine de l’exposition « La Forza delle rovine » (Rome, Palazzo Altemps, 7 octobre 2015-31 janvier 2016). Elle est l’auteure de plusieurs articles ayant trait aux relations qu’entretiennent l’art et l’archéologie aux xxe-xxie siècles ainsi qu’à la présence de l’Antiquité dans la création actuelle, notamment dans la photographie et le cinéma italiens.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Audrey Norcia - «"On n'a jamais rien fait d'aussi dépouillé." - Les idoles archaïques de Picasso, Picasso idole d'aujourd'hui »

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Joshua I. Cohen, professeur, City College, The City University of New York
« "Picasso's Guitar" (1912) and Two Ivoirian Masks »

Biographie : Joshua I. Cohen (Ph.D. université de Columbia) est professeur assistant d’histoire de l’art africain au City College of New York. Son premier livre (en cours de rédaction) se concentre sur une série d’engagements par des artistes européens et africains avec la sculpture africaine entre 1905 et 1980. Ses domaines de spécialisation comprennent l’art moderne et contemporain en Afrique, le « primitivisme » dans l’art et dans les discours de l’histoire de l’art, les politiques culturelles en Afrique de l’Ouest, la tradition internationale du « ballet » africain, les études postcoloniales, et la muséologie.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Joshua I. Cohen - « "Picasso's Guitar" (1912) and Two Ivoirian Masks »

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Camille Talpin, doctorante contractuelle en histoire de l'art, Université de BourgogneFranche-Comté
« Sculpter par le regard: quand la vue métamorphose des objets et crée l'œuvre »

À partir des années 1950, dans son atelier de Vallauris, Picasso compose plusieurs œuvres dans lesquelles interviennent des objets collectés par l’artiste et réunis, par le processus du modelage en plâtre, dans des créations nouvelles, que sont, par exemple, « La Chèvre », « La Grue », « Petite fille sautant à la corde » ou « La Guenon et son petit ». Les corps humains et animaliers apparaissent ainsi à travers des objets familiers, qui, soumis au regard de Picasso, se métamorphosent en parties anatomiques ou en éléments de décor. Le regard de l’artiste sculpte et l’œuvre semble moins naître de la main, qui maîtriserait savoir-faire et technique, que du regard, saisissant à la fois la poésie et le pouvoir formel des objets collectés au détour d’une décharge ou réunis dans la richesse de l’atelier de l’artiste. Fondateur dans les œuvres de Vallauris, le regard de Picasso, posé sur le quotidien qui l’entoure, joue un rôle déjà essentiel dans son œuvre antérieure, tout en répondant à une tradition artistique bien établie, à travers laquelle quelques objets les plus simples prennent place dans des œuvres originales. Confronté à la reproductibilité des plâtres originaux par la fonte en bronze, le regard sculpteur de Picasso se trouve compromis par la main du fondeur, qui ensevelit sous une unité nivelant la présence des objets, encore palpable dans les modelages en plâtre. Le regard du spectateur apparaît par conséquent telle une possibilité essentielle, afin de compenser la disparition, voire l’annulation, par le bronze, de la métamorphose poétique opérée par le regard de l’artiste. Le spectateur s’engage, en effet, dans une quête visant à identifier ce que le regard de Picasso a su voir, quant au voisinage formel entre ces objets si familiers convoqués dans le processus de création et le répertoire formel des œuvres contemplées. Cette dynamique intersubjective entre le regard de l’artiste et celui du spectateur interroge la dénomination la plus adaptée pour qualifier ces œuvres créées à Vallauris, déployant, en effet, l’existence d’un « art comme jeu », pour reprendre une aspiration du poète et ami de Picasso, Michel Leiris.

Biographie : Après une licence en histoire de l’art et archéologie, ainsi qu’un master recherche, mention cultures et sociétés, xvie-xxie siècles, obtenus à l’université de Bourgogne Franche-Comté (Dijon, France), Camille Talpin est actuellement doctorante en histoire de l’art contemporain, au sein du laboratoire du Centre Georges Chevrier (UMR 7366) de l’université de Bourgogne Franche-Comté (Dijon). Bénéficiaire d’un contrat doctoral entre 2013 et 2016, dirigée par Bertrand Tillier, professeur en histoire de l’art contemporain et co-encadrée par Valérie Dupont, maître de conférences en histoire de l’art contemporain, sa thèse porte sur les rapports entretenus par l’écrivain et ethnologue Michel Leiris avec l’art et les artistes de son temps, en interrogeant la singularité de la sensibilité artistique de l’écrivain à partir de son riche corpus d’écrits sur l’art. Dans le cadre de ce doctorat, Camille Talpin assure également des charges de cours en histoire de l’art des xixe et xxe siècles et a organisé plusieurs séances du séminaire doctoral de son laboratoire de rattachement – « Transversales » –, caractérisé par la pluridisciplinarité et la transversalité des problématiques soulevées dans ce séminaire.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Camille Talpin - « Sculpter par le regard: quand la vue métamorphose des objets et crée l'œuvre »

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Erika Martelli, maître de conférence, Università degli Studi di Parma
« En acte et en puissance: le geste créateur entre Michel Leiris et Pablo Picasso »

Biographie : Erika Martelli est ethnologue et spécialiste en littérature du xxe siècle. Maître de conférences à l’université de Parme (Italie), elle a publié, entre autres, la monographie « Pour une poétique de l’échec. De Michel Leiris à Georges Perec », Edicta, 2007.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Erika Martelli - « En acte et en puissance: le geste créateur entre Michel Leiris et Pablo Picasso »

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Table ronde « Assemblages »

Modération par Virginie Perdrisot

Ina Conzen, directrice scientifique adjointe et conservatrice chargée des peintures et sculptures 1900-1980, Staatsgalerie Stuttgart
Discussion between Painting and Sculpture: « Picasso's Bathers »

Ilaria Cicali, docteur en histoire de l'art contemporain, Università degli studi di Firenze/Université de Paris Ouest Nanterre
« La jeune sculpture face à Picasso: un dialogue en esquisses »

Laurence Madeline, conservateur en chef du patrimoine, Musée d'art et d'histoire de Genève Médium et symbole.
« La palme dans les sculptures de Picasso »
 

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Ilaria Cicali : « La jeune sculpture face à Picasso: un dialogue en esquisses »

Ilaria Cicali, docteur en histoire de l'art contemporain, Università degli studi di Firenze/Université de Paris Ouest Nanterre

Biographie de l’auteur

Chargée de cours en histoire de l’art contemporain à l’Università degli Studi di Firenze, 2015 Post-doctoral Fellow au Center for Italian Modern Art de New York, en 2013 j’ai soutenu ma thèse sur l’œuvre parisienne d’Alexander Archipenko (1909-1914), dans le cadre d’une co-tutelle entre l’Università di Firenze et l’université de Paris Ouest Nanterre La Défense. Mes intérêts de recherche et publications portent sur le développement de la sculpture au xxe siècle, et plus précisément, sur la représentation de la figure humaine, le rendu du mouvement, et les relations entre sculpture, danse et peinture dans les années 1910 ; ainsi que sur la présence des sculpteurs internationaux en Toscane dans la seconde moitié du xxe siècle.

Colloque « Picasso. Sculptures » : Ilaria Cicali - « La jeune sculpture face à Picasso: un dialogue en esquisses »

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Laurence Madeline : « La palme dans les sculptures de Picasso »

Laurence Madeline, conservateur en chef du patrimoine, Musée d'art et d'histoire de Genève Médium et symbole.

Dans six sculptures différentes – « Objet à la feuille de palmier », 27 août 1930 ; « Femme enceinte », 1949 ; « La Chèvre », 1950 ; « Femme portant un enfant », 1953 ; « La Plongeuse », 1956 ; « Le Taureau », vers 1958 – Picasso utilise des fragments de palme. Ce faisant, il agit ainsi qu’André Breton l’avait analysé dans son article du Minotaure, « Picasso dans son élément », publié en 1933 : « Une aimantation élective, qui exclut toute élaboration préalable, décide seule, par le truchement de la substance qui se trouve littéralement sous la main, de la venue d’un corps ou d’une tête. » Au-delà du hasard, dont le poète fait un élément majeur de la création de Picasso, celui-ci renoue, en utilisant des palmes, avec des pratiques primitives, des symboliques classiques et également primitives qui remettent en cause sa seule approche aléatoire, pragmatique et inspirée.

Biographie : Laurence Madeline est conservateur en chef aux Musées d’art et d’histoire de Genève. Elle est actuellement commissaire des expositions « Picasso. 1932 » (Paris, musée Picasso, automne 2017) et « Hodler. Parallélisme » aux Musées d’art et d’histoire de Genève (2018) où elle a déjà organisé les expositions « J’aime les panoramas. S’approprier le monde » (2015), « Gustave Courbet. Les années suisses » et « Rodin. L’accident. L’aléatoire » (2014). Ancien conservateur au musée d’Orsay, elle a été commissaire des expositions « Crime et châtiment » (2010), « James Ensor » (2009), « Picasso/Manet. Le Déjeuner sur l’herbe » (2008). Spécialiste de Picasso, elle a organisé les expositions « On est ce que l’on garde. Les archives de Picasso » (2003), « Picasso Ingres » (2004) et, à Johannesburg et à Cape Town, « Picasso and Africa » (2005-2006). Elle a été commissaire générale de l’exposition « Picasso à l’œuvre. Dans l’objectif de David Douglas Duncan » (Genève, 2011) et commissaire de « Picasso devant la télé » (Consortium de Dijon, Genève, 2013 ; musée Picasso de Münster et musée Picasso de Málaga, 2014). Auteure de « Picasso Van Gogh » (La Martinière, 2006) et d’«Ultra sauvage. Gauguin sculpteur » (Adam Biro, 2000), elle a également publié la correspondance de Gertrude Stein et Picasso (Gallimard, 2005) et les lettres de Dalí à Picasso (Le Promeneur, 2005) ainsi que « Picasso devant la télé » (Les Presses du réel, 2013).

Colloque « Picasso. Sculptures » : Laurence Madeline - « La palme dans les sculptures de Picasso »

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Xavier Lucchesi : « Sculptures de Picasso sous X »

Xavier Lucchesi, artiste

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Colloque « Picasso. Sculptures » : Xavier Lucchesi - « Sculptures de Picasso sous X »

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